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29.4.15

Therapy?, Disquiet (Amazing Record Co)

Fondé à la fin des années 80 par Andrew James Cairns (guitare, voix) et Fyfe Ewing (batterie, voix), le combo d’Irlande du nord a connu son heure de gloire au milieu des années 90 avec, notamment, l’album « Troublegum » (1994). En 2009, le groupe fêtait ses 20 années de carrière et enregistrait, dans la foulée, un treizième album moyennement inspiré : « A Brief Crack Of Light ». Produit par Tom Dalgety (Royal Blood, Band Of Skulls, Turbowolf), « Disquiet » est la première réalisation du nouveau label anglais Amazing Record Co. et il montre un Therapy? qui semble avoir retrouvé la voie de l’inspiration. Le premier single, « Still Hurts », donne un bon aperçu de la rage sourde qui anime encore les irlandais. Le fait d’avoir joué la totalité de « Troublegum » sur scène l’année dernière semble avoir booster l’inspiration du trio. A ce titre, « Insecurity » sonne presque comme un remake de « Trigger Inside » que l’on retrouve sur l’album emblématique de 1994. Après un très bon démarrage « Tides » calme le jeu avec ses accords de guitare plaqués qui font progressivement monter la sauce jusqu’à un refrain mélodique en diable. « Good News Is No News » s’avère être un morceau encore plus aéré que le précédent avec un refrain explosif qui va faire chavirer les foules en concert. Alors que « Vulgar Display Of Powder » est un clin d’œil à un des albums majeurs de Pantera « Deathstimate » clôture ce disque sur une tonalité douce-amère. « The road ahead looks shorter than the one behind » chante Cairns. On espère que ce titre n’est pas une sorte d’épitaphe sonnant le glas d’une carrière riche en émotions soniques.

Markus Schenker

Therapy?, Disquiet (Amazing Record Co-La Baleine)
Sortie le 23 mars 2015

therapyquestionmark.co.uk

Therapy?, Still Hurts, official video

11.9.14

Helmet, Betty, la tournée anniversaire

Après avoir célébré les 20 ans de la sortie de son second album, «Meantime», de 1992, Helmet continue de revisiter sa discographie sur scène. Aujourd’hui, c’est « Betty », troisième opus de 1994, qui est joué en live dans son intégralité par le groupe de Page Hamilton. Explications en compagnie du leader d’Helmet à la veille d’une tournée française en novembre.

Pour quelle raison avez-vous décidé de fêter les 20 ans de la sortie de « Betty » ?
Page Hamilton : C’est une bonne date car 10 ans auraient été trop tôt et 30 ans plus tard nous serions trop vieux pour jouer ce disque sur scène (rires). Avant tout, c’est un challenge excitant que de pouvoir présenter « Betty » sur scène dans son intégralité. Nous en avons discuté avec notre agent à Londres, car c’est lui qui nous a suggéré cette idée, et cela nous a plu.

Avant que « Betty » ne sorte, nous étions dans une période où toutes les maisons de disques cherchaient le prochain Nirvana. Quels souvenirs gardes-tu de cette époque ?
P.H. : 1994 est l’année où Kurt Cobain s’est suicidé. J’ai donc écrit des chansons dans ce contexte très particulier. C’était une période assez étrange. A l’époque, nous ressentions une vraie connexion avec ce que Nirvana faisait de son côté à Seattle. Quand ils sont venus jouer pour la première fois à New York, ils venaient de sortir leur premier album, « Bleach ». Nirvana avait signé sur le label Sub Pop et Helmet était sous contrat avec Amphetamine Reptile qui avait, en partie, inspiré les fondateurs de Sub Pop. Nous étions deux groupes très différents mais il y avait une réelle connexion entre nous. Nirvana était, en quelque sorte, un groupe pop très accessible alors qu’Helmet pratiquait une musique plus musclée, tendue et heavy…

A l’époque de « Betty », certains journalistes décrivaient votre musique comme de « l’aggro-punk-atonal-rock » ?
P.H. : Il est vrai que l’on nous a collé toutes sortes d’étiquettes. Je me souviens qu’un type trouvait que l’on faisait du « metal industriel » (rires). Aux débuts des années 90, on allait dans les magasins de disques pour vendre notre single « Born Annoying » et les mecs nous disaient que notre musique était vraiment différente, que celle-ci incorporait des éléments du hardcore punk mélangés à du metal industriel. On leur disait que quoi qu’ils disent, cela nous convenait (rires). Dans iTunes, par exemple, au début, nous étions associés à la scène alternative puis, deux ans, plus tard, Helmet était dans la catégorie « metal ». Pour moi, c’est plutôt une bonne et une mauvaise nouvelle car cela veut dire qu’Helmet pratique une musique dure à définir. Pour quelqu’un qui écoute du metal, notre style n’est pas directement influencé par le genre. Pour une personne qui aime le hardcore, nous n’incorporons pas assez éléments de ce type dans nos morceaux. C’est donc toujours assez bizarre toutes ses tentatives pour étiqueter notre musique. J’en ai lu des douzaines au cours de ses 25 dernières années. Il ne faut donc pas trop y accorder d’attention.

De quelle façon décrirais-tu aujourd’hui « Bettty » ?
P.H. : Comme je l’ai déjà dit c’était une période particulière dans ma vie. Je venais de quitter ma fiancé de l’époque, qui est devenu plus tard, ma femme et dont je suis, aujourd’hui, séparé (sourire). Je vivais dans un petit appartement de la 60ème rue, dans l’Upper East Side de Manhattan et nous commencions à avoir du succès en tant que groupe underground de New York. En même temps, nous étions choqués par la disparition brutale de Kurt… Tout cela a influencé la conception de « Betty ». Je me souviens qu’il y avait quelque chose de très organisée dans notre façon de concevoir chaque titre de cet album. En même temps, par moments, la part d’improvisation donnait une impression de chaos à l’ensemble. C’était assez paradoxal… Musicalement parlant, je voulais que l’on élargisse la palette de nos influences, que l’on fasse des choses différentes par rapport à nos précédents albums. Nous ne voulions pas produire un disque identique à « Meantime ». Je souhaitais que chacun de nos disques soit une progression. « Betty » est l’album qui est arrivé au bon moment à cette période.

Comme « Meantime » avait été un succès (ndlr : disque d’or avec plus de 2 millions d’exemplaires vendus à travers le monde), est-ce que vous avez ressenti un peu plus de pression pour enregistrer son successeur ?
P.H. : Je ne dirais pas que l’on ressentait de la pression. En fait, nous étions un groupe assez sûr de lui, de ses choix, j’en étais le principal compositeur et guitariste. Puis, nous nous occupions également de la production. Mais, comme nous avions eu un disque d’or, beaucoup de gens avaient une opinion sur l’orientation musicale que nous devions suivre. Comme nous avions bien réussi notre second album, il n’y avait pas vraiment de raisons de s’en faire pour la suite. Il y avait effectivement une certaine forme de pression de la part de notre management et de notre maison de disques. Ils nous ont suggéré de travailler avec un co-producteur, même si nous estimions que ce n’était pas nécessaire. Il y avait pas mal de points sur lesquels il fallait se battre. Avant l’enregistrement de « Betty », nous n’avons pas pu beaucoup répéter car nous étions sans cesse en tournée… Et, quand un groupe commence à gagner de l’argent, il y a toujours des enjeux particuliers qui se mettent en place.

Gardes-tu quand même une image positive de cette période ?
P.H. : Je suis content que nous nous en soyons sorti et j’aime beaucoup « Betty ». Ces derniers temps, nous avons joué le disque 3 ou 4 fois et nous avons vraiment pris du plaisir à le faire. C’est un super challenge que de devoir jouer celui-ci dans son intégralité sur scène aujourd’hui.

Est-ce que tu as gardé des souvenirs particuliers du processus d’enregistrement de ce disque ?
P.H. : Nous avons enregistré « Betty » dans les studios de Steely Dan, River-Sound, dans l’Upper East Side. Je me souviens que l’ingénieur du son avait des problèmes familiaux que le minaient et nous étions sans cesse en train d’essayer de lui remonter le moral… Je me souviens également qu’une fois, nous avons traversé la ville pour aller au studio. Nous étions en plein hiver et les rues étaient toutes blanches. Nous avions pris un taxi dont le conducteur polonais était complètement ivre ce qui nous a obligé à en prendre un autre... Il y a plein de petites anecdotes bizarres autour de la conception de ce disque. C’était une période très euphorique mais également stressante. Cela peut s’entendre dans la façon dont les morceaux sont joués, on sent la tension.

Quels ont été les rôles exacts des producteurs Butch Vig et Andy Wallace ?
P.H. : Andy a mixé le disque alors que Butch a seulement travaillé sur une reprise que nous avons faite de Led Zeppelin pour un album hommage. Il a juste mixé le titre « Milquetoast » que l’on peut retrouver sur la BO du film « The Crow ». Dans les crédits de « Betty », nous retrouvons également T-Ray, un producteur venu du hip hop, qui avait fait quelques remixes pour nous. C’était donc une équipe qui nous a permis d’expérimenter certaines choses et de mieux appréhender le travail sur la production.

Quels sont tes titres préférés sur ce disque ?
P.H. : Il y a « I Know » qui est une chanson qui me met toujours en vrac quand je l’interprète en live. J’aime beaucoup « Tic » avec son riff très efficace. « Wilma’s Rainbow » est le morceau que nous avons le plus joué sur scène. On aime beaucoup interpréter « The Silver Hawaiian » qui a été, en grande partie, composée par notre bassiste de l’époque, Henry Bogdan. Il y a également « Sam Hell » qui m’a permis d’utiliser un vieux microphone Green Bullet. C’est drôle car ce disque nous donne des idées pour le prochain album que nous allons enregistrer.

Commercialement parlant, comment « Betty » a-t-il été reçu à l’époque ?
P.H. : Ce disque n’a pas eu le même succès que « Meantime », ce qui a déçu notre maison de disques de l’époque (ndlr : Interscope). Comme « Betty » arrivait après le succès commercial de « Meantime », il est naturel qu’il y ait eu une volonté de répéter la formule de notre second disque. En ce qui me concerne, je fais ce que j’aime, ce en quoi je crois et j’avais envie d’essayer de nouvelles choses. Mais, la maison de disques voulait tout le temps nous pousser dans des directions que nous n’avions pas forcément envie d’emprunter. La chose la plus gratifiante et que, 20 ans, plus tard, cet album est très bien considéré par nos fans, ce qui me rend particulièrement fier. Nous avons enregistré ce disque avec une vraie sincérité, en essayant d’être créatif, sans essayer de reproduire bêtement la formule du second.

Est-ce que l’on peut dire que « Betty » a été un album cathartique pour toi ?
P.H. : Effectivement, que ce soit du processus d’enregistrement jusqu’à la tournée qui s’en est suivie. C’était un bon moyen pour moi de tourner le dos à mes problèmes du moment. Malheureusement, aujourd’hui, à l’âge de 54 ans, ma vie est à nouveau au même point. Je n’arrive pas à garder une relation stable et je suis impatient de retourner sur la route pour fuir mes problèmes. Je n’ai pas de vie de famille, à chaque fois que j’entame une relation avec une femme, je fous tout en l’air. C’est assez ironique comme situation...

Tu es donc dans un très « bon » état d’esprit pour effectuer la tournée anniversaire de « Betty »…
P.H. : Oui, c’est le cas de le dire ! (rires).

Propos recueillis par Laurent Gilot
Photos : DR

En concert en France (les nouvelles dates) :
Le 06 novembre à Montbéliard (L’Atelier des Moles)
Le 07 novembre à Vannes (L’Echonova)
Le 08 novembre à Bordeaux (Le Krakatoa)
Le 10 novembre à Paris (La Flèche d'Or)

Helmet, Live in KEPX studios, 2013